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LES LETTRES DE MON TRAPICHE
16 janvier 2017

"Al fin, el hombre bala" de Pedro Perez del Solar, par Jorge Cuba Luque

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Campo Letrado Editores, Lima, 2016, 149 pages.  Colección Autopista del Sur.

Pedro Pérez del Solar est né à Lima, en 1966, et a publié un travail de recherche sur la BD, Imágenes del desencanto (2013). Après avoir vécu vingt ans aux Etats Unis, il s’est réinstallé dans sa ville natale, où il réside actuellement.

Les nouvelles recueillies dans Al fin, el hombre bala, du Péruvien Pedro Pérez del Solar sont marquées par un signe peu fréquent dans la prose narrative de son pays : une étrangeté légèrement drôle, aux bords du fantastique. La raison se trouve sans doute dans le cadre qui sert de toile de fond à quelques uns des dix-neuf récits de ce volume : le cirque ou l’ambiance qui l’entoure.  C’est le cas notamment de la nouvelle qui donne le titre au livre (« En fin, l’homme obus »):  Benítez, le patron d’un cirque d’infime catégorie où il exerce aussi comme mage, a décidé de mettre en place un numéro « fort » pour essayer de gagner du prestige et faire ainsi venir des spectateurs. Il se procure un canon, de fantaisie, oui, mais canon quand même donc potentiellement dangereux ; Zelmiro Gallo, motard et ancien livreur de pizzas est embauché pour le poste. Mais, le jour J, Zelmiro tarde à se présenter au cirque et Benítez commence à paniquer à mesure qu’approche l’heure du début du spectacle car le numéro avait été annoncé avec tous les moyens possibles.  Le Renard Chanteur, les clowns La Momie et Margarino, Lanceur-de-Coteux ou La Femme-en-Plastique, le soutiennent tout en pensant que Zelmiro ne viendra car c’est un poste à risque. Homme de cirque né, Benítez sait bien que le show doit toujours continuer : il sera lui-même l’homme obus…

Les personnages du cirque de Benítez ont tous quelque chose de bizarre, pas uniquement dû au rôle qu’ils jouent, mais aussi à cause de leur propre personne, d’une certaine manière ils sont  en décalage avec la vie ordinaire, et c’est également le cas pour beaucoup des autres personnages qui peuplent ce volume : la bande de vieux copains qui ont pour hobby de traverser une autoroute au risque de leur vie dans « Cruzar la autopista » ; ou la confusion de la perception d’une sœur que l’on prend pour son frère dans « Dos ». L’auteur nous donne aussi des micro-récits dans lesquels il souligne son penchant pour ses créatures tout à fait normales, et peut-être à causes de cela, bizarres.

Mais c’est avec le récit intitulé « Tres » que Pedro Pérez del Solar nous fait un formidable numéro de jonglerie littéraire: une voix narrative à la première personne  nous parle de son frère jumeau mais rapidement le point de vue du narrateur est pris par l’autre frère, et ensuite par un troisième point de vue dans une sorte de synthèse de la perception des deux jumeaux, et ainsi de manière cyclique : ‘Mis padres me hicieron créer que yo éramos mellizos…’Ni Carlos ni Pedro éramos especialmente comunicativos..’ Le tout avec plein d’ironie envers la vie de famille ; d’ailleurs la famille est souvent  présente tout au long du livre, peut-être parce que le foyer familial est, pour l’auteur, un cirque.

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  • Comptes-rendus de lectures (en français) sur des auteurs et livres d'Amérique du Sud non traduits en français. Blog créé et géré par un auteur péruvien (J. Cuba-Luque), un français (A. Barral) et une traductrice (L. Holvoet). Trapiche : moulin à canne
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