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LES LETTRES DE MON TRAPICHE
21 juillet 2018

« Babel de un hombre » , de Javier Montiel. (par Michel Van Thournout)

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Editions Maclein y Parker, Séville, Espagne, 2017, 110 pages.

ISBN : 978-84-947107-0-4

 

Ecrivain, peintre et psychanalyste, Javier Montiel est né à Maldonado, dans l’est de l’Uruguay en 1986 et s’est fixé dans la capitale à 18 ans. Après des études de psychologie et de psychanalyse il exerce actuellement dans cette ville. Il est aussi un des piliers de la librairie « Purpurea » au centre de Montevideo, où il dispense d’excellents conseils de lectures. « Babel de un hombre » est son premier livre. Il a également un « livre-objet » intitulé « Astrolabio » qui réunit une demi-douzaine de contes comme des lettres sous des enveloppes illustrées. En tant qu’auteur, il se situe dans la veine des « raros » (les bizarres, les étranges) de la littérature uruguayenne comme Felisberto Hernandez ou Mario Levrero. 

 

Ce fut une rencontre littéraire des plus providentielles. Une rencontre de deux époques, une rencontre de deux territoires similaires, séparés par la ligne équatoriale et situés presque aux frontières opposées d’une même langue, d’un même continent : Le Mexique des années 50-60 et l’Uruguay des années 2010. D’une part j’ai reçu  par le biais d’une amie un livre d’histoires courtes de la mexicaine Elena Poniatowska intitulé : « De noche vienes », et d’autre part grâce à une rencontre sur Facebook, un livre de contes de l’auteur uruguayen Javier Montiel intitulé « Babel de un hombre y otros relatos ». J’ai eu à ce moment-là l’inspiration de lire les deux livres en même temps, en sautant d’une histoire à l’autre et donc d’un livre à l’autre… Quelle fut ma surprise d’y retrouver des similitudes au niveau de la qualité du récit ainsi qu’au niveau de certaines thématiques très latino-américaines, que sont entre autres le « réalisme-magique », comme ceux des débuts d’Isabel Allende.

C’est en tous les cas ce qui ressort à première vue des récits de Javier Montiel. Mais en y regardant de plus près nous pourrions dire que ce que nous lisons est plutôt une vision psycho-analytique (on y retrouve probablement la formation professionnelle de l’auteur)  d’une vision déformée de la réalité de chaque personnage. Nous pouvons même nous demander si ce n’est pas nous qui, en lisant, percevons leur réalité comme normale et si c’est la nôtre qui est dérangeante/anormale. Cette perception de la réalité qui est constamment analysée et interprétée par notre cerveau (me référant aux recherches scientifiques récentes des pouvoirs cognitifs du cerveau) est bien expliquée par Anil Seth dans le ‘TED-talk’ suivant: https://www.ted.com/talks/anil_seth_how_your_brain_hallucinates_your_conscious_reality. Peut-être est-ce ça la clef à la lecture de chaque conte qui parfois frôle la Science-Fiction ?

Finalement nous pouvons conclure que les contes de E.Poniatowska nous racontent des histoires d’émancipation sociale tandis que les histoires de J.Montiel nous donnent un aperçu d’émancipation d’ordre psycho-mental. En quelque sorte E.Poniatowska aurait pu introduire J.Montiel  avec le conte suivant « Castillo en Francia » où elle écrivit: ‘En realidad lo que llamamos vivir no es más que un acto de la imaginación’… Et en réponse à cela nous avons J.Montiel qui dans son conte « Luis Amador o Babel de un hombre » nous raconte un fait anodin vu par différentes personnes comme entre autres une certaine Sidonie : ‘Sidonie diría que Amador nunca despertó realmente, sino que, por el contrario, ha quedado atado al sueño eterno y ni siquiera lo ha notado’.

Bref, J. Montiel nous projettera entre rêve et réalité :

- D’une visite d’une maison à vendre à un cauchemar en équilibre précaire (‘Casa

en ruinas’)

- D’un portrait parfait et succulent à un meurtre viscéral (’Oleo s/ Tela I’)

- D’une rencontre banale entre amis dans un café à une transformation corporel de

différents états physiques et les embêtements que cela engendre… (‘Estados’)

- D’une réparation banale dans une salle de bains à une intense orgie par une faille

dans l’espace-temps. (‘Azulejo’)

- De la prémonition d’un meurtre parfait à la solitude d’une observation féline.

(‘Soledad’).

- D’une poursuite angoissante à la rencontre de son propre reflet dans un miroir et

l’échange instantané des partenaires reflettés  (ou pas ?). (‘Techos circulares’)

- D’un suicide interminable dû à un arrêt dans l’espace-temps… (‘Caida libre’)

- Et bien plus encore !...

 

En quelque sorte les histoires courtes de J. Montiel son hautement recommandables et vivement une traduction pour le public francophone !

 

Javier-Montiel

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  • Comptes-rendus de lectures (en français) sur des auteurs et livres d'Amérique du Sud non traduits en français. Blog créé et géré par un auteur péruvien (J. Cuba-Luque), un français (A. Barral) et une traductrice (L. Holvoet). Trapiche : moulin à canne
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