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LES LETTRES DE MON TRAPICHE
11 novembre 2021

« Las alfombras gastadas del Gran Hotel Venezuela », de Eloi Yagüe Jarque (par Antonio Borrell)

Gran-Hotel-Venezuela-jpg

 

Editorial Contrabando , Valencia (Espagne), 2021, 200 pages.

ISBN : 978-84-123473-5-7

 

Eloi Yagüe Jarque est né à Valencia, en Espagne, en 1957, mais très jeune il émigre au Venezuela avec sa famille. Il y fera des études de journalisme et de littérature. Il y a exercé le métier de journaliste culturel, chroniqueur, puis à son tour enseignant en journalisme à l’Université Centrale du Venezuela. Il se consacre également à l’écriture de romans policiers, obtenant divers prix, dont le Juan Rulfo en 1998, décerné par Radio France Internationale. En 2019 il quitte le Venezuela pour revenir s’installer dans sa ville natale. 

Bibliographie partielle : La inconveniencia de servir a dos patronos (1998)(Prix Juan Rulfo). Las alfombras gastadas del Gran Hotel Venezuela (1999). Editorial Planeta Venezolana. Manuscrito inédito de Ramos Sucre (2000). Comala.com. Esvástica de sangre (2000). Grupo Norma. Bogotá. Guerras no santas (2004). Comala.Com. Cuando amas debes partir (2006). El show de Willy (2015). Carena. España. Ellos eran tan bellos (2019) Ediciones Carena y Spectrum Arts. España. 

  

Avec ce titre qu’on pourrait traduire par « Les tapis usés du Grand Hôtel Vénezuela », il s’agit du premier roman publié de l’auteur, en 1999 à Caracas, mais la version que j’en ai lu est une réédition récente faite à Valencia. Eloi Yagüe Jarque livre un polar qui joue avec tous les codes du genre, et rend explicitement hommage aux grands classiques anglo-saxons qu’il mentionne dès les premières pages, tout en conservant un petit décalage, une touche discrète d’ironie qui lui évite de tomber dans le poncif. Il se prend au jeu sans se prendre au sérieux. 

L’enquêteur est un homme mûr, solitaire et désabusé, qui aime le tabac noir et le whisky : Fernando Castelmar est un journaliste fait-diversier de Caracas qui décide de prendre des vacances pour la première fois depuis douze ans, et recherche un lieu tranquille pour écrire un roman policier. C’est ainsi qu’il arrive en autobus par une petite route sinueuse au « Gran Hotel Venezuela », un établissement assez décati, perché à mi-pente, entre les plages caraïbes et la montagne, dans un décor tropical, non loin du pittoresque village de Cacaotal. Il est presque le seul client, et les quelques employés de l’hôtel forment une drôle d’équipe. Il y a Democracia, la réceptionniste incompétente, Flor Debora la femme de ménage, « El Bùho », veilleur de nuit qu’on ne voit presque jamais, Camargo l’homme à tout faire, et Antonio Agraz, le distingué barman vétéran, qui parle beaucoup, sait faire parler, et en sait peut-être un peu trop… Enfin il y a Wilfredo, le jeune guide touristique stagiaire, amoureux de sa seule cliente, la belle touriste suédoise, Inga.

Dès le deuxième soir, Castelmar est invité à une partie de poker chez Wolfgang Terminus, le gérant de l’hôtel, qui habite une riche demeure non-loin de Cacaotal, où se retrouvent tous les notables du village, le maire, le médecin, le chef de la police et le curé. Alors que Castelmar est en train de se faire plumer, le téléphone sonne et la nouvelle tombe : Agraz le barman vient d’être retrouvé mort dans sa chambre. Fernando Castelmar commence à enquêter, et comprend vite que le très aimable et raffiné Terminus a beaucoup de secrets, mais aussi qu’il tire beaucoup de ficelles et que tous les notables du coin sont ses obligés. Heureusement, Castelmar a aussi son réseau et des amis dans la police, car avec l’assassinat de la belle Inga les choses vont se compliquer.

Après quelques péripéties rocambolesques et un séjour en cellule, Castelmar se retrouve seul dans l’hôtel resté désert. Depuis le début du texte, quelques indices trahissaient l’origine valencienne de ce personnage (en quoi il ressemble à l’auteur lui-même), et ce long moment de solitude passé à boire dans le bar abandonné est l’occasion d’une introspection, les souvenirs reviennent, on découvre le lien qui unissait Agraz à Castelmar, ainsi que la jeunesse de ce dernier à Caracas, ses aspirations de poète, ses échecs sentimentaux, ses désillusions politiques. 

Si l’auteur ne s’encombre pas trop de réalisme dans la résolution des énigmes policières, le livre est plus intéressant par le tableau qu’il brosse de la communauté espagnole exilée au Venezuela après la Guerre Civile (le plus célèbre d’entre eux fut sans doute l’anarchiste Antonio Ortiz qui monta un incroyable plan pour assassiner Franco avec un avion de tourisme), et les souvenirs de ce pays des années 60 aux années 90, une période déjà complexe que les épisodes Chavo-Maduristes ont un peu effacée des mémoires. Il parait que l’auteur a écrit une trilogie policière autour de Fernando Castelmar, qu’il serait peut être intéressant de lire en entier… 

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  • Comptes-rendus de lectures (en français) sur des auteurs et livres d'Amérique du Sud non traduits en français. Blog créé et géré par un auteur péruvien (J. Cuba-Luque), un français (A. Barral) et une traductrice (L. Holvoet). Trapiche : moulin à canne
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