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LES LETTRES DE MON TRAPICHE
4 janvier 2024

« El Derrumbamiento », d’Armonia Somers. (par Antonio Borrell)

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Editorial Contrabando, Valencia, 2021, 120 pages

ISBN : 978-84-122452-6-4

Armonía Liropeya Etchepare Locino, dite Armonia Somers, née à Pando, non loin de Montevideo, en 1914, échappe aux classifications littéraires, comme un certain nombre d’autres auteurs uruguayens. Chronologiquement, elle aurait pu faire partie de la « génération de 1945 », dont les figures les plus connues furent Mario Benedetti, Ida Vitale, Idea Vilariño, Angel Rama… Mais elle resta en marge et cultiva longtemps le flou sur sa biographie, d’autant plus que ses écrits pouvaient paraître scandaleux dans la mentalité conservatrice de l’époque. Elle fut institutrice, puis se spécialisa dans l’étude de la délinquance juvénile et à ce titre représenta son pays lors de missions auprès de l’OEA et de l’UNESCO. Son œuvre littéraire, peu abondante, touche à l’étrange, au fantastique et à l’érotisme. 

De 1950 à sa mort en 1994, elle aura publié une douzaine de livres entre romans et recueils : La mujer desnuda, 1950, De miedo en miedo, 1965, Un retrato para Dickens, 1969, Viaje al corazón del día. Elegía por un secreto amor, 1986, Sólo los elefantes encuentran mandrágora, 1986, El derrumbamiento, 1953, La calle del viento Norte y otros cuentos, 1963, Muerte por alacrán, 1978, Tríptico darwiniano, 1982, La rebelión de la flor, 1988, El hacedor de girasoles, Montevideo, 1994. Il semblerait que seul « Mort par scorpion » ait été publié en français, en 1987, chez Arcane 17, mais « El Derrumbamiento » a été traduit sur la base de l’édition de Contrabando et avec la même préface. On attend la parution.

 

Cette édition espagnole du deuxième livre d’Armonia Somers est précédée d’une préface extrêmement intéressante signée par l’écrivain uruguayen Gustavo Espinosa, que les lecteurs du Trapiche connaissent déjà. Elle se compose de cinq contes d’une vingtaine de pages. Outre la préface, j’ai aimé le conte éponyme qui ouvre le recueil. Au-delà, j’avoue avoir éprouvé une certaine difficulté à entrer et me frayer un chemin dans la prose luxuriante d’Armonia Somers. C’est certainement ma faute, mea maxima culpa. Peut-être un moment mal choisi pour cette lecture. J’en garde la curiosité de lire d’autres de ses livres, pour corriger cette première impression, et d’en apprendre plus sur Armonia Somers elle-même, dont je me suis formé une image à la Sarah Bernhardt, qui pourrait sortir d’un de ses contes obscurs. 

El derrumbamiento (L’effondrement) : un homme fuit dans la nuit, sous la pluie, dans la boue, trempé, mal chaussé, poursuivi. Il a tué, il est noir. Il invoque la vierge Marie, attend son aide qui ne vient pas, il la maudit. Il arrive devant une masure presque en ruines, frappe à la porte, on lui ouvre, c’est un marchand de sommeil qui héberge d’autres gueux, qui dorment à même le sol, dans la pénombre. Alors qu’il s’endort, le fuyard voit descendre vers lui la vierge, qui va lui proposer un étrange pacte… Ce texte qui mêle angoisse, érotisme et sacrilège est terriblement transgressif pour l’époque, même si on n’y trouve aucun mot explicite, tout est en images chastes et sans aucune lueur d’espoir !

Requiem por Goyo Ribera : Goyo Ribera est mort d’une maladie contagieuse, des croque-morts masqués vont le conduire au cimetière, alors qu’une seule personne en deuil forme le misérable cortège. Il s’agit de Martin Bogard, qui fut amoureux de Goyo dans sa jeunesse. Le corbillard va trop vite et Martin se trouve distancé et égaré dans une ville inconnue, scène à la fois cocasse et sinistre qui ferait penser à du Mario Levrero, mais la chronologie est formelle, c’est Levrero qui a lu Somers ! La suite du conte évoque divers épisodes de la vie de Martin, certains cocasses, mais on s’y perd un peu…

El despojo : Ici c’est encore l’histoire d’une fuite, comme dans « El derrumbamiento », celle d’un employé de ferme qui était l’amant de la femme de son patron. Dans sa fuite il viole une adolescente… 

La puerta violentada : un coiffeur dégoûté de son métier devient fou parce qu’il a perdu à la loterie et il rend folles ses sœurs célibataires…

Saliva del paraiso : j’ai eu du mal à suivre le fil de ce texte qui se focalise successivement sur divers personnages qui se croisent au cours d’une soirée pluvieuse, parfois sans se voir, et vivent tous des moments dramatiques de leur existence…  

Obscurité, pluie, solitude, fuite et mort…

 

 

 

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  • Comptes-rendus de lectures (en français) sur des auteurs et livres d'Amérique du Sud non traduits en français. Blog créé et géré par un auteur péruvien (J. Cuba-Luque), un français (A. Barral) et une traductrice (L. Holvoet). Trapiche : moulin à canne
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